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Reçu le 8 janvier 2010 de Guy Allix

Nombreux sont les poètes patentés et sûrs de leur génie qui font la fine bouche dès que l’on évoque la chanson… Oh que voilà un art vulgaire auprès de la "vraie poésie" (la leur bien sûr... qui pourrait en douter ?) ! Pourtant longtemps après que nombre de ceux-ci auront disparu ainsi que leurs pauvres mots, les chansons de Brassens, de Ferré, de Brel, de Bertin, de Leclerc et autres Le Forestier courront encore dans les rues. Comme celles de nos premiers poètes qui chantaient eux aussi ne vous déplaise.

A 18 ans, je ne connaissais rien ou presque à la poésie et je me mis soudain à écrire (en octobre 1971) dans le soleil de Brassens. Il me fallait sans doute un papa et il fut un peu le mien même si je ne l’ai jamais rencontré et s'il ne voulait pas de projéniture. Je crois d'ailleurs qu'il fut le père adoptif de beaucoup.

Plus tard je serais Brassens ou rien ! J’ai alors aussi emprunté la guitare des copains. Mais elle jouait souvent mal dans mes bras et le chemin serait long assurément pour jouer, comme lui, avec un Salvador. Et puis mes mots prirent d’autres chemins qu’après tout mon maître avait su me montrer. N’avait-il pas donné voix à nombre de poètes que j’avais découverts grâce à lui ?

Mais mon admiration, mon affection, n’a jamais varié. Celui qui traversait toujours par les passages cloutés pour ne pas avoir affaire aux forces de l’ordre m’a appris la rigueur de la vraie révolte, de la vraie liberté. Il m’a appris cette incroyable tendresse qu’il y a dans une ombre de croix qui se couche sur une nymphe pour un "petit bonheur posthume". Ou encore dans l’évocation pudique de ce papa qui sait pardonner à l’inverse des « chrétiens du pays » pour lesquels « l’évangile c'est de l’hébreux ». Il m’a enfin appris l’amour des mots ciselés, l’amour du travail bien fait, cent fois remis sur le métier. Je garde des chansons comme « Bonhomme », « Saturne », « Le Blason » (voir ci-après) ou encore « Stances à un cambrioleur »  comme de petits bijoux. Et quand il m’arrive de reprendre dans mes bras ma guitare appelée Marie c’est tout naturellement que je fredonne du Brassens. D’autant que le poète était aussi, il faut le dire contre les idées si bien reçues des oreilles peu sensibles, un merveilleux mélodiste. Ah la musique de « l’orage », celle du « Vieux Léon », celle de cette peu banale "chansonnette à celle qui reste pucelle" magistralement mise en voix par Le Forestier ! Allez donc dire à un bon guitariste que ce n'est pas de la musique. C'est qu'il faut tâter pour tout jouer Brassens.

Je donne ici les textes de deux chansons moins connues de lui.

J’ai longtemps fredonné la première contre les imbéciles heureux qui étaient nés quelque part et qui ne concevaient pas qu'on puisse avoir le mauvais goût de naître ailleurs et même de ne pas se plaire dans leur terre sainte transformée en véritable prison. Quant à la seconde, elle ne m’a jamais quitté et je l’ai même intégrée tout naturellement à mon récital lorsque j’ai repris, comme mon maître mais bien plus tard, le chemin de la scène.

Merci à toi Tonton Georges. Je te dois beaucoup.

Guy Allix, poète

Lire la page : http://guyallix.art.officelive.com/GeorgesBrassens.aspx